Revenir
2024
4 bancs en bois
dimensions variables
© Greg Clément
Revenir interroge le rôle du banc et de l’assise dans l’espace public. J’ai souhaité inviter les spectateurs et les habitants à arpenter le territoire, mais aussi à contempler les espaces hétérogènes de Vernier. Pour favoriser la déambulation et l’observation attentive, je propose plusieurs interventions sur quatre bancs de l’espace public.
Les bancs et la marche sont intimement liés. Le banc sert certes à s’as- seoir, mais sa signification ne se limite pas à cet usage primaire. Il est plus qu’un simple outil ou un objet rencontré par hasard. En tant qu’arrêt matérialisé, le banc contient, concentre et concrétise le trajet qui nous a amenés jusqu’à lui1 . À l’échelle du paysage, le banc apparaît comme une ponctuation, et le trajet effectué à pied ou à vélo comme une ligne ou un segment. Chaque banc se rattache aux autres et devient un élément de connexion et de suture dans les paysages hétérogènes de la ville. Les bancs créent un rythme dans le paysage, une continuité entre les différents sites, et accentuent leur mise en réseau.
Revenir présente des alignements d’empreintes digitales agrandies gravées dans le bois des bancs. Créés par un enlèvement de matière, ces mo- tifs servent de liens visuels entre les bancs et forment un itinéraire. Chaque banc est relié au suivant, créant une ligne fictive qui connecte les espaces variés de la ville de Vernier : Vernier village, les bords du Rhône, la périphérie, puis le cœur du Lignon.
Revenir peut être perçu comme une série de sculptures dans le paysage, mais également comme des objets qui n’existent que grâce à ce qui les entoure. On peut tout à fait considérer un banc comme une sculpture et examiner ses qualités formelles. Mais à l’usage, lorsque l’on est assis dessus, on ne peut plus appréhender l’objet dans sa totalité. Le banc qui fait voir ne se laisse pas voir2 indique Michel Jakob, professeur de théorie et histoire du paysage. On peut évaluer son ergonomie, profiter du confort qu’il procure, apprécier les matériaux et les textures… Mais il devient surtout le moyen de fixer l’attention du spectateur et de l’amener sans effort à l’observation. Avec cet aspect fonctionnel, ces projets disposent d’un potentiel de mise en retrait et d’effacement au profit de la contemplation. Ces sculptures se rendent disponibles à ce qui les entoure et aptes à résonner avec leur environnement. En se fondant dans le paysage, ces bancs peuvent servir d’outil poétique pour valoriser des parcelles publiques de la ville. En effet, le banc en milieu extérieur favorise le désir du marcheur de s’attarder ou de s’arrêter. Il permet de configurer et structurer le paysage, car par sa seule présence dans une portion d’espace, un banc peut en faire un lieu reconnu comme tel et le rendre repérable3 .
1 Michel Jakob, Poétique du banc, Paris, Éditions Macula, 2014, p.7.
2 ibid. , p.6.
3 Marion Nemchi, Le banc public : son rôle dans l’environnement urbain et recherche d’emplacements, Université de Genève, Département de géographie, 2003, p.46.